La philo et moi, ça fait bien plus que deux. A vrai dire, ça fait même 12, une note que j’ai durement acquise au bac, après une année de terminale sans jamais atteindre la moyenne dans cette matière. Durement acquise, disais-je, puisqu’au terme d’une semaine de révisions pendant laquelle j’ai plusieurs fois cru me noyer sous toutes ces notions de bonheur, de vérité et de liberté, j’ai finalement cliqué sur le lien d’une vidéo Youtube intitulée « Comment avoir 12 au bac de philo ». Apparemment bien plus efficace qu’une année avec un prof de lycée agrégé.
Tout ça pour dire que je croyais ne pas aimer la philo, et qu’elle me le rendait bien. Alors quand j’ai ouvert le premier album de Pico Bogue, j’ai enfin respiré. Pas de dissertations ni d’élucubrations vaporeuses, mais des dessins simples, des personnages attachants et des réflexions sur le monde à la fois simples et profondes.
Simple et profond. Intense et léger. Comme un bon café.
Pico Bogue, c’est un enfant d’une dizaine d’années qui regarde et commente le monde autour de lui, souvent accompagné de sa petite sœur Ana Ana (qui a d’ailleurs le droit à sa propre série, à destination des plus petits). Deux enfants qui pointent du doigt certaines absurdités de la société, tout en s’émerveillant de la beauté du monde. Ne vous méprenez pas, Dominique Roques – la scénariste – et Alexis Dormal – l’illustrateur – n’ont pas donné vie à des Aristote miniatures, aux réflexions d’adultes dissimulées sous un masque enfantin : on parle bien ici de deux gamins attachants et insupportables, experts dans la goinfrerie de chocolat et dans le refus d’aller au lit. Deux enfants qui se chamaillent, font et disent quantités de bêtises, qui provoquent leurs parents et se moquent allègrement des adultes autour d’eux. Mais aussi un frère et une sœur qui ne peuvent pas s’empêcher de s’aimer, d’aimer leurs proches, et dont le besoin primaire reste avant tout un bon gros câlin.
Les sujets abordés sont variés : l’amitié, l’identité, la famille ou encore l’art – l’excellent tome 10 est entièrement consacré à ce sujet. On retrouve des personnages plus ou moins récurrents, comme l’oncle Antoine, complètement dépassé par la fougue de ses neveux dans le tome 6, ou encore la courageuse institutrice de Pico, qui doit tenir tête aux négociations incessantes du héros, dont l’objectif est avant tout d’en faire le moins possible en classe. En tournant les pages, on rit, on s’émerveille, on s’arrête quelques secondes pour apprécier la profondeur d’une réflexion, on sourit devant une réplique cinglante ou devant l’image de nos deux héros partis en fou-rire, les quatre fers en l’air en se tenant le ventre.
La série compte pour l’instant 15 tomes, dont la nouveauté : « Les heures et les jours ». De quoi passer quelques heures à se bidonner dans un fauteuil, et à offrir sans modération.
Agathe