Il ne faut que quelques saynètes pour croquer efficacement les situations – une forme narrative qui n’est pas sans évoquer les nouvelles d’Italo Calvino, dans Marcovaldo ou ailleurs, ce qui laisse à penser que plutôt que les sujets – les bassesses et lâchetés des protagonistes italiens des Nouveaux monstres pourraient sans beaucoup d’effort devenir français, par exemple – c’est le récit en lui-même qui participe de l’âme italienne.

Ces scènes, on aimerait les savoir irréelles, au trait forcé par le sarcasme, mais qui sait ? Il n’y a pas bien loin du Vittorio Gassman du sketch Un citoyen exemplaire aux 38 témoins de Lucas Belvaux, lui-même inspiré de l’affreuse affaire de Kitty Genovese – si ce n’est que le traitement de Belvaux est parfaitement sérieux, tandis qu’Ettore Scola préfère montrer un protagoniste plastronnant, bouffon – bien sûr qu’on ne s’identifiera pas, qui le voudrait ? Pourtant, le miroir tendu par Belvaux et celui tendu par Scola renvoient chacun la même image, et elle n’est guère reluisante.

Constitué de 14 sketchs à l’origine, Les Nouveaux Monstres a vu deux d’entre eux censurés pour la sortie française – tandis que le film exploité encore aujourd’hui intègre Il Sospetto et Con i saluti degli amic, alors qu’il en censure certains sortis en France, comme le très scandaleux Pornodiva. Difficile donc de juger le film sur son intégralité, mais les 12 segments restant demeurent un chant du cygne tout à fait digne pour la comédie à l’italienne, genre qui ne passa plus guère les frontières italiennes après le début des années 1980. Panorama plutôt exhaustif du genre, et festival de talents (avec en ténors  Vittorio Gassman, Ornella Muti, Alberto Sordi, Ugo Tognazzi) , Les Nouveaux Monstres est notre classique du mois.